Fief - LOPEZ David

Couverture FiefQuelque part entre la banlieue et la campagne, là où leurs parents ont eux-mêmes grandi, Jonas et ses amis tuent le temps. Ils fument, ils jouent aux cartes, ils font pousser de l'herbe dans le jardin, et quand ils sortent, c'est pour constater ce qui les éloigne des autres.
Dans cet univers à cheval entre deux mondes, où tout semble voué à la répétition du même, leur fief, c'est le langage, son usage et son accès, qu'il soit porté par Lahuiss quand il interprète le Candide de Voltaire et explique aux autres comment parler aux filles pour les séduire, par Poto quand il rappe ou invective ses amis, par Ixe et ses sublimes fautes d'orthographe. Ce qui est en jeu, c'est la montée progressive d'une poésie de l'existence dans un monde sans horizon.
Au fil de ce roman écrit au cordeau, une gravité se dégage, une beauté qu'on extirpe du tragique ordinaire, à travers une voix neuve, celle de l'auteur de Fief.

Biographie de l'auteur

David Lopez, né en 1985, est titulaire d'un Master de Création littéraire de l’Université Paris 8. Il est emblématique d’une génération d’écrivains venue à l’écriture par des biais neufs et inattendus. Il habite Nemours.
"Fief" (2017) est son premier roman.

Date première édition: août 2017

Editeur: Seuil

Genre: Roman

Mots clés :

Notre avis : 7.14 / 10 (7 notes)

Enregistré le: 31 mars 2018



Marie-Claire
Appréciation de lecture
Fief
Appréciation : 8 / 10
Commentaire #7 du : 05 juin 2018
C’est l’histoire de Jonas et de sa bande ,pas des délinquants dans une cité difficile, juste des copains désoeuvrés dans une ville moyenne avec ses pavillons, ses tours et ses frontières invisibles mais infranchissables entre bourges, petits caïds et eux, les personnages qui n’arrivent pas à sortir de leur fief, qui n’arrivent pas à s’inventer un futur.
Ce roman est surtout un formidable documentaire sur la vie de ces gentils fumeurs de cannabis et l’écriture innovante restitue parfaitement un univers qu’on ne connaît pas . La performance tient à la langue faite de mots d’argot, de verlan, de trouvailles, c’est rythmé, c’est « du vrai » , on sent l’influence du rap et l’auteur a réussi à mettre par écrit cette langue orale .
Je regrette cependant que le roman soit construit sans intrigue , il se présente comme une suite de scènes , de tranches de vie : Jonas et ses copains, Jonas et la boxe, Jonas et sa copine, Jonas et son père…..et c’est répétitif, volontairement mais parfois un peu lourd.
Mais c’est un livre fort avec de l’humour – le passage sur Candide est un grand moment – de la tendresse aussi pour ces personnages – les souvenirs d’enfance de Jonas à travers les quatre saisons – c’est aussi un livre engagé sur le déterminisme social : on ne naît pas égaux, on le devient et surtout grâce à une bonne maîtrise de la langue .
Wesh, d’où tu parles comme ça toi ? Tu nous prends pour des teras ou bien ?
Joëlle
Appréciation de lecture
Fief
Appréciation : 8,5 / 10
Commentaire #6 du : 08 mai 2018
Un roman et ou une réalité. Une narration très subtile toute en poésie, humour et empathie.
C'est une incursion dans la vie de "gosses" en panne d'inspiration pour donner à leur vie un ailleurs meilleur, un ailleurs rêvé.
Sortir de leur périmètre de vie, c'est constater les manques, les différences.
C'est la différence avec Lahuiss, seul étudiant de la bande de potes qui cite Voltaire, mais aussi la tendresse de Jonas quand il fait l'amour à sa copine et qu'il ne la "baise" pas (langage réservé entre copains), les fautes d'orthographe de Ixe, et le rappe de Poto qui est un cri de douleur d'une jeunesse sans avenir, en mal de projection.
C'est un peu Renaud dans son HLM.
Un premier roman très réussi, j'a beaucoup aimé.
Pomah
Appréciation de lecture
Fief
Appréciation : 6 / 10
Commentaire #5 du : 07 mai 2018
brut de coffrage, on rentre directement dans la littérature de banlieue, celle des jeunes d'aujourd'hui, la drogue, l'insouciance, le sexe, et la boxe ( beaux passages du livre ) les dialogues se fondent dans le texte - quelques passages m'ont fait rire, dans d'autres, un brin de poésie,( la coccinelle qui sera sauvée de la noyade) les souvenirs d'enfance de JONAS, mais à aucun moment, aucun de ces jeunes ne se projette dans l' avenir - ce temps là, présent, on y vit, on y est, on y pleure, ou on se bat - quelques extraits sont percutants , celui de la dictée m'a beaucoup plu , une dictée en "j'écris comme je cause" avec les virgules," une putain de virgule", avec autant de fautes que de mots

bien que la critique fusse sévère - peut être faut il y voir autre chose : un monde parallèle à celui dans lequel nous évoluons, le leur.....
et je pense à ces quelques lignes d'une célèbre chanson du disparu DANIEL BALAVOINE ( quand on arrive en ville)

- nous tout ce qu'on veut, c'est être heureux, être heureux avant d'être vieux, on a pas le temps d'attendre d'avoir 30

ans".....
Cathiou
Appréciation de lecture
Fief
Appréciation : 7 / 10
Commentaire #4 du : 03 mai 2018
Le choix du milieu m'a intéressée.
On comprend que ces jeunes ne partent pas avec les mêmes chances, on rentre dans leur vie et c'est dur.
Le vocabulaire m'a dérangée à certains moments , mon intérêt a été inégal.
Je n'ai pas aimé le passage sur Candide, j'ai trouvé le style plat, par contre tous les passages sur la boxe sont très forts et documentés.
C'est bien que ce livre existe même si l'ennui de ces jeunes a pu me déranger.
J'en conseille la lecture.
Michel G.
Appréciation de lecture
Fief
Appréciation : 5 / 10
Commentaire #3 du : 18 avril 2018
C'est effectivement une bande de jeunes. Plus bêtes que méchants, dont Jonas, boxeur amateur mais looser professionnel.
Un fil rouge bien ténu pour faire un roman.
Roman dans lequel il est rare de trouver une page sans qu'il soit question de "clope" et surtout de "oinj", à croire que le cannabis est un médicament efficace et en vente libre...
Quant au style où les dialogues sont noyés dans le texte, vraiment pas folichon ("je dis oui", je dis ok", "elle tire une taffe" etc.). Mais pour faire très tendance actuelle, Lopez nous sert un vrai langage de banlieue (dont on se lasse vite) et n'oublie pas de nous servir un chapitre sexe (vers les pages 103/104, vous saurez tout, tout, tout sur le...)
Alors quand même 5/10 ? Oui pour la description du métier de boxeur amateur, pour le foot version "vétérans" et pour la dictée tirée du "voyage au bout de la nuit" de Mme Céline (sic).
Gislaine
Appréciation de lecture
Fief
Appréciation : 7 / 10
Commentaire #2 du : 14 avril 2018
Ce livre "Fief" en fait, n'est pas un roman mais plutôt un constat de
"ce qu'on fait quand on ne fait rien".

Une bande de potes qui s'emm... dans une petite ville de province (comme Nemours, domicile de l'auteur).
Le lecteur sait seulement qu'ils sont issus de la zone pavillonnaire
et puis le livre "tend le micro" à Jonas qui raconte quelques tranches de vie sans début ni fin. Une vie faite d'inactivité, de joints, beaucoup de joints et d'alcool pour meubler les journées entre deux entrainements de boxe.

Ce sentiment de désœuvrement est bien rendu et on s'ennuie en même temps qu'eux !

Deux bons passages à noter : le résumé de Candide de Voltaire et la dictée issue de voyage au bout de la nuit.

Extraits :
L’ennui, c’est de la gestion. Ça se construit. Ça se stimule. Il faut un certain sens de la mesure. On a trouvé la parade, on s’amuse à se faire chier.

C’est un nuage qui m’accueille. Quand j’ouvre la porte je vois couler sous le plafonnier cette nappe brune, épaisse, et puis eux, qui baignent dedans. Ixe, ça ne le dérange pas qu’on fume chez lui, du moment qu’on ne fume pas de clopes. Je le regarde, entre lui et moi c’est presque opaque. Il plane dans le brouillard. On est bien reçus chez toi, je dis. Je n’ai pas le temps d’ajouter quoi que ce soit que déjà il me pose sa question rituelle. Tu veux rouler ? Je dis oui.
Michel-Henri
Appréciation de lecture
Fief
Appréciation : 9 / 10
Commentaire #1 du : 14 avril 2018
Un roman, peut-être devrais-je dire un récit, assez déroutant. Par son style d’abord qui fait alterner le langage des banlieues pour les dialogues avec une écriture plus classique quand le narrateur fait part de ses réflexions. Il n’y a pas de dialogues normés non plus mais une succession de phrases du genre « Il me dit ah tu te la colles pas avec nous ce soir ? Je lui dis calme-toi déjà j’vais me rouler un oinj... ».
Cela donne un style nouveau auquel il faut s’habituer mais qui rend bien compte d’une certaine atmosphère.
L’habileté de l’auteur c’est d’avoir pris un groupe de jeunes assez indéterminé. Ils sont de la cité mais pas tout à fait puisqu’ils habitent sur sa limite dans des pavillons. On ne connaît pas leur origine, on apprend à un moment que l’un des leurs est noir mais on les imagine plutôt d’horizons divers. Pas de trace non plus de religion. On peut donc les identifier à tous ces jeunes issus de la banlieue.
La première sensation que l’on a en lisant ce roman c’est celle de l’ennui. Tout est gris, poisseux de désespérance, ici pas de perspective. La seule qui existe c’est de monter sur la butte pour voir le soleil se coucher et il est souvent masqué par les nuages. Pourtant c’est une petite ville, on sait que là tout près il y a les gens aisés avec des maisons à piscine, un centre ville où d’autres jeunes font la fête à la fois semblables à eux et si loin. Ils se côtoient donc ces deux mondes mais sans jamais vraiment se rencontrer, au plus se frottent-ils l’un à l’autre.
Quel est donc ce plafond de verre qui les sépare ? C’est sans doute un tas de choses mais qui se concentre sur le langage. Toujours il leur manque les mots pour exprimer ce qu’ils ont à dire. Et quand d’autres jeunes leur parlent ils se sentent agressés, dévalorisés puisqu’ils n’ont pas les mots pour dire, pour nommer. Ne reste que le repli sur l’entre-soi. La cité leur apparaît ainsi comme un refuge, le seul endroit où ils sont chez eux. Et encore même là les mots sont bloqués, le père et le fils ne savent pas se dire leur amour. Les garçons n’ont que les mêmes insultes toujours identiques pour traduire leur amitié.
David Lopez a su éviter les clichés sur la banlieue ce qui donne beaucoup plus de force à son propos. Jonas ne se dédouane pas d’être ce qu’il est, il s’en veut même d’une certaine façon de se complaire dans ce milieu débilitant, d’ailleurs il a des rêve. Il voudrait lire, il voudrait se mettre à boxer plus sérieusement, il voudrait pouvoir complaire à Wanda. Donc pas de complaisance de la part de l’auteur envers ses personnages mais en même temps il nous montre pourquoi ils ne peuvent s’en sortir, comment la cité les aimante et les poisse pour toujours dans ses bras vénéneux. Jonas en est l’archétype, il subit. C’est son entraîneur qui lui dit quand il va boxer, c’est sa copine qui lui demande de la faire jouir, c’est ses potes qui décident de ses soirées, tout dans sa vie se décide en dehors de lui et les rares moment de joie qu’il a, il a l’impression d’y entrer comme par effraction, que ce n’est pas fait pour lui.

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