Les Méditerranéennes - RUBEN Emmanuel

Couverture Les Méditerranéennes

Décembre 2017, banlieue de Lyon. Samuel Vidouble retrouve sa famille maternelle le temps d’un dîner de Hanoukkah haut en tohu-bohu et récits bariolés de leur Algérie, de la prise de Constantine en 1837 à l’exode de 1962. En regardant se consumer les bougies du chandelier, seul objet casé dans la petite valise de Mamie Baya à son arrivée en France et sujet de nombreux fantasmes du roman familial – il aurait appartenu à la Kahina, une reine juive berbère –, il décide de faire le voyage, et s’envole pour Constantine. Il espère aussi retrouver Djamila, qu’il a connue à Paris, la nuit des attentats, et qui est partie faire la Révolution pour en finir avec l’Algérie de Bouteflika.
Passé et présent s’entrelacent au long de ses errances dans les rues de Constantine, aussi bien qu’à Guelma et Annaba, retrouvant les lieux où sa grand-mère s’est mariée, où son grand-père s’est suicidé, où sa mère est née, où sa tante s’est embarquée pour Marseille. De retour en France, il ne cesse d’interroger les femmes de sa famille, celles à qui revient d’allumer les neuf bougies, pour élucider le mystère du chandelier.
Au fil de leurs souvenirs, il comprend ce qui le lie à l’Algérie et ce qui lie toutes ces générations de femmes que l’histoire aurait effacées s’il n’y avait des romans pour les venger. Derrière les identités multiples, légendaires, réelles ou revendiquées – passé berbère, religion juive, langue arabe, citoyenneté française –, c’est l’appartenance à une communauté géographique qui se dessine : le vrai pays de ces Orientales, c’est la Méditerranée, la Méditerranée des exilés d’hier et d’aujourd’hui, la Méditerranée d’Homère et d’Albert Cohen, d’Ibn Khaldun et d’Albert Camus.

Biographie de l'auteur

Jérémie Emmanuel Ruben Brassac, né en 1980, connu sous le nom de plume d'Emmanuel Ruben, est un écrivain et dessinateur français.
Ancien élève de l’École Normale Supérieure, agrégé de géographie, il passe plusieurs années à l’étranger, en tant que lecteur de français, professeur d’histoire-géographie ou volontaire international (Italie, États-Unis, Turquie, Lettonie, Ukraine) avant d’entamer une carrière universitaire qu’il abandonne avec la publication de son premier roman de manière à consacrer tout son temps libre à l’écriture et au dessin. Placé actuellement en disponibilité de l’éducation nationale, il a enseigné l’histoire et la géographie pendant quatre ans en banlieue parisienne.
Parallèlement à la publication de ses livres, il a signé une chronique mensuelle sur le site Sens Public et collaboré à différentes revues littéraires : Ravages, Edwarda, Possession immédiate, Remue.net. Par ailleurs, il a exposé ses dessins et ses aquarelles dans des galeries et des lieux publics. Enfin, il tient à jour un site Internet personnel (L’araignée givrée, www.emmanuelruben.com) où il dévoile de nombreux dessins et des textes inédits. Ses thèmes de prédilection (la frontière, la mémoire, l’histoire, la géographie, l’utopie, le voyage impossible) se retrouvent notamment dans son troisième roman, "La ligne des glaces", premier épisode d’une suite européenne et nordique à laquelle il travaille depuis plusieurs années. Le livre a été sélectionné pour de nombreux prix littéraires dont le Prix Goncourt 2014.

Depuis 2015, il participe à l’aventure du Collectif Inculte avec lequel il s’engage sur différents projets d’écriture à plusieurs mains. Il contribue ainsi aux volumes collectifs En procès. Une histoire du XXe siècle (2016) et Le livre des places (2018).

Date première édition: août 2022

Editeur: Stock

Genre: Roman

Mots clés :

Notre avis : 8 / 10 (1 note)

Enregistré le: 19 octobre 2022



Michel-Henri
Appréciation de lecture
Les Méditerranéennes
Appréciation : 8 / 10
Commentaire #1 du : 27 novembre 2022
Voici un roman que je qualifierai de géographique. Et je me laisse aller à penser que c'est bien l'intention de son auteur qui fait du narrateur un professeur d'histoire-géographie et qui donne pour titre à son roman un mot qui signe l'appartenance à une terre. D'ailleurs on va plus loin puisque l'histoire est ici fille de la géographie. C'est cette région avec des caractéristiques climatiques bien identifiées qui semble enfanter une culture et ses nombreux avatars, commune à tous ces peuples.

C'est aussi une quête d'identité de la part du narrateur. Il est fils du Sud et du Nord. Il va osciller entre les deux parts de lui-même, voulant rejeter à l'adolescence des racines algériennes qu'ils trouvent trop exubérantes, trop chargées d'une histoire lourde à porter et puis il y a le voyage initiatique à Constantine là où il cherche ses racines dans la géographie de la ville et qu'il peine à retrouver : les lieux précis ne lui parlent pas. Mais l'atmosphère générale, la ville en tant qu'entité va lui révéler la part de lui-même qu'il voulait occulter. En comprenant les siens, enfin, il peut dialoguer avec ses ancêtres. Il doit accepter qu'il est multiple. Il peut enfin reconnaître que leur faconde qui l'agaçait, cachait un silence, une mutité, presque une pudeur sur la douleur et le déchirement de l’exil. Emmanuel Ruben met bien en parallèle ce vrai exil, celui qu'ils ont ressenti dans leur chair, avec l'éternel errance du peuple juif présenté ici comme un trait culturel et non pas comme une souffrance. Car les gens de son clan se sentent juifs mais pas des errants, ils sont de là, d'un lieu, d'une ville, trouvent leurs racines dans une Jeanne Hachette berbère défendant un peuple contre des envahisseurs loin des religions qui furent multiples sur ces terres.

Et puis n'oublions pas l'un des traits principaux du livre. La lignée ce sont les femmes, ce sont elles qui survivent, qui font le lien, le liant ; dans l'histoire de cette famille. La force, le souffle, la souffrance et la transmission ce sont elles qui les portent, les hommes sont là presque comme des faire valoir, d'ailleurs souvent présentés comme des hâbleurs.

Pas de dithyrambe surtout ! C’est ce que j'ai particulièrement apprécié. Le narrateur ne cache rien des errements géopolitique de sa famille. Il ne les excuse pas mais veux aimer les êtres au-delà de leur préjuger. Ce sont les descriptions d'actes parfois anodin de leur vie qui peignent le mieux les personnages, leur donnent de la chair et c'est par la réminiscence de leur quotidien que Samuel va le mieux réapprendre à les aimer.

La construction du livre par tableaux successifs à partir d'un personnage et d'un fait donne une lecture très agréable, comme si nous découvrions progressivement de petites scènes qui donneront à l'ensemble toute sa signification.

Beaucoup de nostalgie donc dans ce livre mais aussi l'impression que rien n'est fini, que la saga continue, que les morts et leurs souvenirs sont là pour les vivants.

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